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Dans la peau d’une personne obèse

Rouen : dans la peau d’une personne obèse pour se confronter au regard des autres

Depuis 2014, le CHU de Rouen forme des personnels à la prise en charge des personnes souffrant d’obésité. Lors de ce stage, les soignants sont confrontés au regard des gens.

Marcher dans la rue, "une épreuve horrible" se rend compte Jessica
Marcher dans la rue, "une épreuve horrible" se rend compte Jessica © Radio France - Stéphane Garcia

Changer le regard et la prise en charge des personnes obèses. C’est l’objectif de ces formations dispensées par le CHU de Rouen depuis 2014 au personnel soignant. Le programme durant deux jours : échanges, manipulation et prise de conscience sur le regard des autres. Pour ce faire, certains soignants ont endossé une combinaison qui mime la corpulence d’une personne qui fait 150 kg.

La combinaison pèse 18 kg et donne la corpulence d'une personne de 150 kg
La combinaison pèse 18 kg et donne la corpulence d'une personne de 150 kg © Radio France - Stéphane Garcia

Prisonnier d'un corps"

S’habiller. Voilà le premier défi une fois équipé de cette tenue qui nous alourdit de 17 kg supplémentaires, comme le reconnaît Christelle. “C’est compliqué, on est limité dans nos mouvements, que ce soit au niveau des jambes, des épaules. On se retrouve prisonnier d’un corps. J’ai déjà le sentiment d’être exclue des autres parce que incapable de faire des choses ‘normales’“.

"Horrible au quotidien"

Un sentiment d’exclusion que les soignants vont constater directement dans la rue. Aller acheter un café ? “On ne passe pas inaperçu, remarque Jessica. D’habitude les gens ne me regardent pas dans les yeux, mais toutes les têtes se tournent dans ma direction. C’est dénigrant, c’est un regard méchant, comme du dégoût”. Elle ajoute : “Au quotidien, ça doit être horrible. Je comprends pourquoi certaines personnes obèses refusent de sortir de chez elle”. 

Devant la boulangerie, les regards se font de plus en plus pressant sur Jessica
Devant la boulangerie, les regards se font de plus en plus pressant sur Jessica © Radio France - Stéphane Garcia

Acheter un paquet de chouquettes. Voilà un exemple de challenge proposé aux soignants en formation. C’est Jessica qui s’y colle, elle aussi aide-soignante. Mais une fois devant la vitrine de la boulangerie, très vite elle se rend compte que tous les regards sont posés sur elle, qu’ils soient curieux, insistants, lourds. “Très vite, je me suis focalisée sur la vitrine pour ne pas les subir. J’ai essayé de faire au plus vite à la boulangerie pour que ça s’arrête”

C’est un regard dénigrant, méprisant, voire du dégoût”

Il y a les mots aussi. Une jeune fille va dire à son ami “être aussi grosse, c’est pas possible”, un garçon lâcher en pleine rue “c’est horrible”. Très vite, Jessica va répondre au tac-au-tac, sous forme d’humour, d’ironie, pour interpeller les passants qui la dévisagent. “J’ai pris l’humour comme carapace pour mettre en avant autre chose que mon ‘poids’. C’est une façon de détourner l’attention”, explique-t-elle. 

Une prise de conscience 

Verdict ? “Je ne pense pas avoir ce genre de regard face aux patients obèses, mais à présent je serai plus vigilante”, souligne Nathalie. “Avoir vécu ces situations va faire de nous de meilleurs soignants, on fera attention aux gestes aussi”, raconte Cindy. “On a beau aimer ce métier et avoir de l’empathie, on est aussi humain et on peut faire des erreurs”. Un avis partagé par Vanessa Folope, qui gère la formation, “la grossophobie est partout, que ce soit volontaire ou non. D’où l’intérêt de ces stages”

Depuis 2014 environ 200 soignants, essentiellement du CHU de Rouen, ont suivi ce stage de sensibilisation à l’obésité. Un enjeu de santé publique en Normandie, une des régions de France les plus touchées au vue du nombre de personnes en surpoids.

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